La Gymnastique Bothmer dans les écoles Steiner-Waldorf : une manière discrète de ne pas faire de sport

Capture du 2013-09-28 23:12:25

Rudolf Steiner a toujours été très clair : pour lui, l’être humain ne devrait pas faire de sport ! « La Gymnastique est une barbarie ! » lance-t-il même un jour aux professeurs de la première école Steiner-Waldorf de Stuttgart. Mais que faire lorsque le sport est une discipline obligatoire dans un cursus scolaire normal ? Tout simplement inventer un sport qui n’en est en fait pas un ! Ce dernier s’appellera : « La Gymnastique Bothmer », du nom du disciple auquel le gourou fondateur de l’Anthroposophie passera la commande d’inventer une forme d’activité corporelle aussi désincarnée que possible, ne sollicitant aucune dépense énergétique et ne provoquant nulle contraction musculaire. En fait, pour avoir pratiqué la Gymnastique Bothmer durant des années en tant qu’anthroposophe, par l’intermédiaire d’ateliers que Danièla Hucher organisait mensuellement à Paris, je peux dire qu’il n’y a au fond aucune différence entre cette discipline et l’Eurythmie, la danse-yoga des anthroposophes.

Dans les écoles Steiner-Waldorf, les professeurs de sport ont donc pour injonction d’enseigner de préférence cette « Gymnastique Bothmer », qui n’a en fait de gymnastique que le nom. Toutes les écoles ne sont pas en mesure de le faire en France, en raison du peu de personnes formées. Mais toutes aspiraient à le faire, pour satisfaire aux exigences de Rudolf Steiner. Quand des élèves d’écoles Steiner-Waldorf  venus d’autres pays viennent parfois présenter des « démonstrations » de Gymnastique Bothmer dans les écoles françaises, les pédagogues anthroposophes de nos contrées poussent alors de langoureux soupirs en enviant « la chance qu’ont ces enfants ! ».

La conséquence en est que dans les écoles Steiner-Waldorf, le sport est à ce point déconsidéré qu’il est réduit au minimum syndical, voire moins. Pour ma part, arrivé en Terminale, je n’avais aucune notion de l’effort physique ! Je n’avais jamais réalisé de performances sportives ! Je trottinais en forêt avec mes camarades, comme je le raconte dans Ma vie chez les anthroposophes.

Dans certaines écoles Steiner-Waldorf où j’ai travaillé, cette aversion des pédagogues anthroposophes pour le sport avait pour conséquence que les enfants accusaient des retards psycho-moteurs importants et inquiétants. Par exemple, à l’âge de 9 ans, ils étaient incapables de rattraper et lancer une balle. Ils avaient des réflexes de peur lorsque la balle arrivait sur eux et perdaient l’équilibre, comme des enfants de deux ans. Cela venait du fait qu’en guise d’activité sportive, ils n’avaient fait jusqu’à leur âge que des rondes. Les pédagogues anthroposophes leur avaient même interdit toute pratique de jeux à caractère compétitif dans la cour de récréation, comme des matchs de football ou des « balles au prisonner », estimant que l’esprit de ces jeux comportant un perdant et un gagnant allait « traumatiser leurs petits ». Les jeux avec un ballon dans leur ensemble étaient prohibés, suivant en cela les consignes des anthroposophes estimant que ce genre d’activité développe un agressivité inappropriée, voire une tendance antichristique.

Mais pourquoi une telle haine de Rudolf Steiner pour le sport ? A mon avis, tout simplement parce que pratiquer une activité sportive de manière normale oblige les individus à quitter l’état planant dans lequel voudrait les faire rester l’Anthroposophie. Ainsi, les êtres peuvent plus facilement rester sous emprise et sujets à la manipulation. Déconnectés de leurs corps, ils sont aussi déconnectés d’eux-mêmes. Dans la vidéo dont voici le lien, nous assistons à une séance de Gymnastique Bothmer :

http://www.youtube.com/watch?v=4rRMCYHiqG4

Capture du 2013-09-28 23:49:46(Une attaque de Zombies ? Non, un groupe d’Anthroposophes !)

Quand je la regarde aujourd’hui, mes réactions sont diverses. Tout d’abord, je me rends compte du ridicule qui consiste pour le professeur de gymnastique Bothmer à indiquer, par exemple, le mouvement du pas-chassé comme s’il s’agissait d’un secret initiatique dévoilant des trésors de spiritualité. Ou à baisser et lever les bras comme s’il s’agissait d’un acte cultuel d’une signification infinie. Puis je me souviens qu’il en allait toujours ainsi avec l’Eurythmie ou la Gymnastique Bothmer : on nous faisait faire des gestes d’une banalité et d’une pauvreté sans nom en les enrobant de discours spiritualistes grandioses. Puis, en voyant cette vidéo, je suis frappé d’y reconnaître ces corps d’anthroposophes, ces vêtements d’anthroposophes, ces attitudes d’anthroposophes… Comme ils se ressemblent tous ! Comme ils ressemblent à tout ceux que j’ai connus ! Ils se croient profondément hors de la norme parce qu’ils sont devenus des anthroposophes. Mais ils sont en fait rentrés dans un moule qui fait d’eux des clones d’anthroposophes. Quand je pense que j’ai été l’un d’eux et que j’aurais pu devenir comme eux, mon sang se glace aujourd’hui et la compassion m’envahit.

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Professeur de Philosophie
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