Triodos

De manière générale, je ne cherche pas particulièrement à entendre parler des anthroposophes ni de l’Anthroposophie, ou des institutions issues de cette dernière. Ayant une vie personnelle à construire depuis ma sortie de cette dérive sectaire, j’estime avoir suffisamment fait depuis quelques années pour alerter la société sur la vraie nature de cette mouvance. Mais je n’ai pas non plus l’attitude qui consisterait à me boucher volontairement les oreilles quand j’en entends parler, car je considère qu’il y aurait là une forme de lâcheté de ma part. Comme le dit si bien le poète René Char : « On ne peut tailler dans sa vie sans se couper soi-même ». C’est pourquoi, sans chercher à aller de mon propre chef au devant de ce qui est anthroposophique, je laisse venir à moi les informations concernant ce sujet. 

Certes, je préférerais mille fois vivre dans un monde où l’Anthroposophie n’existerait pas, ou du moins un monde où celle-ci serait suffisamment insignifiante pour que je puisse l’oublier totalement. Mais le monde  réel n’est hélas pas ainsi ! L’Anthroposophie y est presque partout, au point qu’il est très difficile de ne pas la rencontrer, où qu’on aille.

C’est ce qui m’est de nouveau arrivé dernièrement. Un soir, alors que j’étais tranquillement attablé avec mes convives espagnols dans un bar madrilène, devisant gaiement  au sujet des tapas ou des prochains festivals de danse des différentes ville de ce beau pays, une de mes connaissances assise en face de moi m’interpelle soudain : 

– Dis-moi Grégoire, j’ai vu que tu connaissais l’Anthroposophie et les écoles Steiner-Waldorf, c’est bien ça ?

– On va dire ça oui, lui répondis-je un peu sur mes gardes.

– Tu sais, je te pose cette question parce que j’ai travaillé 5 ans à la banque Triodos. Et j’ai été durant la même période membre de la Société Anthroposophique en Espagne, me précise-t-elle.

– Ah bon, fis-je de plus en plus méfiant. Mais tu sais, je ne suis pas nécessairement des plus favorables à leur sujet et….

– Ne t’inquiète pas, j’avais bien compris, me coupe-t-elle-aussitot. En fait je te raconte cet épisode de ma vie parce que j’ai démissionné de la Société Anthroposophique quand j’ai fini par comprendre que c’était un monde sectaire et fermé sur lui-même. Aujourd’hui, je revis, je danse, j’apprends à m’occuper de moi-même !

– Ah je préfères, lui dis-je alors dans un sourire.

– Mais bien sûr, aussitôt que j’ai démissionné de la Société Anthroposophique, la banque Triodos m’a licenciée. C’est comme cela que ça marche chez ces gens-là. Tu ne peux pas être critique envers eux sans qu’ils te le fassent payer très cher s’ils le peuvent !

– Ne te connaissant pas assez bien et n’ayant pas eu le dossier entre les mains, je ne peux confirmer ni infirmer tes propos. Mais ce n’est pas la première fois que j’entends une histoire comme la tienne dans ce milieu, lui répondis-je. Partout où les anthroposophes sont également des employeurs, la liberté de conscience individuelle est à ma connaissance rarement respectée, ni les droits du travail. Bien sûr ils sont malins et peuvent exhiber des contre-exemples à ce genre de réalités, comme cette secretaire d’une école Steiner-Waldorf française qui déclarait dernièrement dans la presse que son employeur n’avait vu aucun problème à ce qu’elle n’inscrive pas ses propres enfants chez eux. Mais il s’agit en réalité de rares spécimens destinés à donner le change. Et s’ils pouvaient les empailler pour continuer à les utiliser après leurs morts, nul doute qu’ils le feraient volontiers. C’est pourquoi il ne faudrait pas que notre civilisation laisse se développer, comme elle le fait aujourd’hui, de grandes ou de moyennes entreprises anthroposophiques. Je suis sincèrement désolé de ce qui t’es arrivé.

– Je te remercie, me dit-elle. Cela fait du bien de rencontrer quelqu’un qui connait leur vraie nature après avoir été à l’intérieur. Il y en a peu.

– C’est moi qui te remercie de ton témoignage, lui répondis-je. Jusqu’à présent, j’avais eu peu d’échos et d’informations au sujet de cette soeur de la NEF qu’est Triodos. Et si ce que tu me racontes m’indigne, je dois dire en revanche que cela ne m’étonne pas.

A propos gperra

Professeur de Philosophie
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