Michel Onfray : critique de la Biodynamie

Extrait du livre : Cosmos Spirituel, Ed. Flammarion.

Chapitre 4 : Théorie du fumier spirituel

J’aime le vin et si j’avais pu boire une seule fois dans ma vie un bon flacon conçu selon les principes de l’agriculture biodynamique, je ne me serais pas interdit la philosophie de Rudolf Steiner, car sa pensée aurait été validée par ses produits. Hélas, je n’ai jamais bu de vin issu de la biodynamie qui ne soit une exécrable piquette. Quand je m’en ouvrais à tel ou tel qui voulait conquérir mon esprit par mes papilles (et il y en eut plus qu’à son tour), j’avais droit à deux types de réaction.

Premier argument : mon palais était formaté par des années de scientisme qui me faisaient prendre pour bon ce qui était mauvais, il était donc normal que je prenne pour mauvais ce qui était bon. Mon jugement de goût était intoxiqué par la chimie, les sulfates, les engrais, mais aussi par le discours oenologique présenté comme idéologique. J’eus droit parfois à des discours qui faisaient d’Yquem, de Pétrus, de Margaux d’authentiques poisons qu’il fallait s’abstenir de boire, sous peine de cancer, qu’on devait s’empresser de verser dans le trou de l’évier !

Le deuxième argument provenait de militants moins installés dans la dénégation et plus aptes à concevoir que le réel avait bel et bien eu lieu : ils concevaient que, peut-être, les critères n’étant pas les mêmes, j’aie du mal à juger sainement. Mais ils trouvaient une raison extérieure au vin pour justifier qu’il ne fût pas aussi bon en bouche que ce qu’annonçait la théorie biodynamique. Le transport de la bouteille, sa conservation, sa manipulation, mais aussi, et surtout, la date, le lieu, l’heure, le jour de la consommation qui ne pouvaient être n’importe lesquels mais qu’il aurait fallu choisir en fonction des mouvements de la lune. Présenté comme un organisme vivant sensible aux mouvements lunaires (et pourquoi pas… mais les autres vins également), le vin n’aurait pas dû être bu au moment où il l’a été sous prétexte qu’il entretenait avec les astres une relation intime lui interdisant de révéler sa vérité dans la bouche du goûteur.

Quoi qu’il en soit, le vin n’était pas bon et s’avérait pâteux, épais, trouble, pas collé (même à l’oeuf) ; il avait la consistance d’un jus de fruit avec microparticules en suspension ; il s’avérait râpeux en bouche, sans longueur aucune ; il révélait des arômes inédits pour un vin, aucun d’entre eux n’étant flatteur – vieille cave, fût malpropre, arrière-goût de vinaigre ou de terre ; il ne ressemblait à rien de connu, mais à rien qu’on ait envie de connaître non plus.

Je compris que ce vin avait moins à voir avec le raisin qu’avec l’idéologie et qu’il procédait d’une croyance qui lui donnait sa loi. La biodynamie est une pensée magique qui, comme toute pensée magique, dont la psychanalyse, produit des effets chez ceux qui y croient. Ce vin imbuvable par un amateur de vin devient le nectar le plus fameux pour un palais qui a renoncé à ses papilles au profit du catéchisme formulé en 1924 par l’ésotériste Rudolf Steiner dans un ouvrage intitulé Agriculture. Fondements spirituels de la méthode biodynamique. Le vin biodynamique est un genre de vin de messe : il ne donne d’extase qu’aux croyants. Rudolf Steiner (1861-1925) est un pur produit de l’idéalisme allemand qui débouche clairement dans l’occultisme, l’ésotérisme. Kant avait séparé le monde phénoménal, susceptible d’une appréhension empirique, et le monde nouménal, inaccessible à la raison et à la connaissance. Steiner déborde le kantisme et affirme qu’on peut accéder au nouménal et le connaître par intuition. Si, ce que je crois, toute religion caractérise une vision du monde qui explique l’ici-bas par un au-delà, alors Steiner propose une religion ; si, ce que je crois également, une religion est une secte qui a réussi, on peut dire que Steiner propose une vision du monde qui visait à la religion et, parce qu’elle n’a réussi que partiellement, cette vision constitue une secte, autrement dit une religion miniature, une religion minoritaire. Dans Rythmes dans le cosmos et dans l’être humain, Steiner raconte que chacun a connu des vies antérieures et que nous nous sommes réincarnés. Nous n’avons jamais été des animaux ou des formes inférieures, mais des êtres humains ayant déjà vécu une autre vie. Steiner distingue corps physique, corps éthérique, corps astral. Les âmes des morts peuvent attendre mille ans avant de se réincarner. Celles des humains qui, de leur vivant, ont eu une haute pratique spirituelle par ascèse intellectuelle peuvent attendre plus longtemps le temps de la réincarnation et de leur descente sur terre, car elles jouissent de ce monde pour lequel elles avaient une dilection particulière. L’anthroposophie est donc une théosophie.

Steiner est intellectuellement parti de l’idéalisme allemand : Kant, Fichte, Goethe, Schiller, Jean Paul, Schopenhauer. En 1891, il soutient même une thèse sur Fichte. Il connaît et fréquente Kafka, Kandinsky, devient franc-maçon et passe de la philosophie idéaliste allemande à l’occultisme et à l’ésotérisme. Il a donné un nombre considérable de conférences, plus de six mille, et rédigé une oeuvre complète pléthorique, plus de 370 volumes. Il a abordé la pédagogie, la médecine, l’agriculture, la politique et couvre la quasi-totalité des champs de la culture. On lui doit des écoles concrètes, des médicaments, un laboratoire pharmaceutique qui constitue une variation sur le thème de l’homéopathie et de la phytothérapie, et cette technique agricole de la biodynamie – et les vins qui vont avec. Il semblerait que, sur la planète, 2 700 fermes se réclament aujourd’hui de l’agriculture biodynamique et que 92 000 hectares de terres agricoles soient dévolus à cette pratique. Un label, Demeter, certifie les produits obtenus en biodynamie et, en France, un autre label fort opportunément nommé Biodyvin (!) garantit lui aussi les produits obtenus avec la méthode de Rudolf Steiner. Ce dernier label français est issu du Syndicat international des vignerons en agriculture biodynamique.

La théorie de la biodynamie se trouve exposée dans une série de conférences effectuées par Steiner entre le 7 et le 16 juin 1924. Elles ont donc été publiées sous le titre déjà cité plus haut. Steiner part d’un constat qu’on ne saurait nier : l’agriculture, devenue industrielle, use de produits chimiques et d’engrais toxiques pour les humains et pour l’humanité. Le conférencier stigmatise la mécanisation, déplore la fin des traditions, encense la sagesse populaire des paysans d’autrefois, vante les mérites de la connaissance empirique paysanne ramassée dans les almanachs.

Peu de temps avant de mourir, à soixante-quatre ans, Rudolf Steiner confesse à son auditoire venu écouter ses propos sur l’agriculture qu’il déplore ne plus pouvoir retrouver le goût des pommes de terre de son enfance et d’autres produits aimés dans ses jeunes années. Il met en relation l’absence de sapidité de ces aliments avec la production industrielle des années 20. Il tient donc l’archétype du discours nostalgique qui affirme que c’était mieux avant sans imaginer une seule seconde qu’il puisse être le jouet de ce que j’appellerai le principe proustien en vertu duquel la mémoire enjolive le goût. Or nous mangeons moins des aliments que leur charge symbolique portée par les expériences originaires du monde des jeunes années.
La pensée anthroposophique oppose deux mondes de façon manichéenne : celui, négatif, de la modernité avec le matérialisme, le scientisme, la raison, la chimie, les engrais, la matière, la mort et celui, positif, de l’anthroposophie avec l’esprit, le corps éthéré, les traditions, le cosmos, l’astrologie, l’ésotérisme, l’occultisme, l’intuition, la nature, la vie. Si le monde continue à vivre selon les principes de la modernité, Rudolf Steiner lui promet la disparition ; si le monde veut se sauver, il lui suffira de souscrire aux principes de l’anthroposophie. Steiner propose donc une pensée sotériologique assimilable à une religion de salut.

En matière d’agriculture, Steiner récuse les abords théoriques, conceptuels, statistiques, universitaires et invite à l’observation sur le terrain concret des champs, des forêts, des bêtes d’élevage dans leurs pâtures. Pas besoin de demander aux livres la vérité sur le monde de la nature, sur l’univers géologique, végétal, animal, il faut interroger le réel directement et dire pourquoi et comment la betterave, par exemple, entretient une relation intime avec l’environnement cosmique de la terre. La raison raisonnable et raisonnante cesse donc d’être l’instrument avec lequel on pense le monde. Steiner lui préfère l’intuition – ce qui lui permet de fonctionner dans le registre performatif sans jamais ressentir le besoin de démontrer, de prouver, de recourir à une méthode expérimentale qui lui permettrait, en renouvelant une expérience à même de confirmer des hypothèses, de parvenir à des certitudes universelles. Steiner peut donc écrire qu’il existe « dans le sol quelque chose (sic) qui agit à la manière de l’astral » (55). On ne saura ce qu’est ce quelque chose, comment le nommer, le penser, le circonscrire, le définir, on ignorera tout autant les modalités d’action de ce principe architectonique posé comme un acte de foi. De même, on cherchera en vain des précisions concernant cette mystérieuse manière de l’astral. Steiner procède de façon performative et assène sans démontrer. Ainsi peut-il dire que l’eau n’est pas que l’eau, autrement dit un composé chimique réductible à des atomes d’hydrogène et d’oxygène, le fameux H20, car elle est plus que l’eau, à savoir une force en relation avec le cosmos.

La pluie, par exemple, n’est pas la précipitation météorologique bien connue (des Normands…), mais le vecteur de forces venues des planètes. De même, le bois de chauffage que Bachelard utilisait dans la cheminée de sa maison bourguignonne va bien au-delà des molécules des rondins : son pouvoir calorifique, affirme Steiner, n’est pas du tout le même suivant que l’arbre aura été planté à telle ou telle époque cosmique, l’une étant plus favorable que l’autre. Ne pensant pas de façon rationnelle mais instinctive, Steiner recourt à des comparaisons qui, selon lui, sont raison.

Bachelard aurait stigmatisé la quantité d’obstacles épistémologiques activés par l’occultiste dans sa démarche intellectuelle. Ainsi quelques-uns des obstacles distingués par le philosophe de La Formation de l’esprit scientifique (substantialiste, verbal, animiste) sautent aux yeux du lecteur avisé de la psychanalyse de la connaissance objective proposée par le penseur des éléments. Steiner le performatif est dans une logique du comme : il pense ainsi le schéma de la relation terre, plante, sol, sous-sol comme la relation homme, tête, diaphragme, entrailles. Ce qui fonctionne dans le registre de l’agriculture est donc induit par la comparaison avec le registre humain. Comme la tête de l’homme, la plante subit les influences des effets du ciel proche, à savoir le Soleil, Mercure, Vénus et la Lune ; comme les entrailles humaines, le sous-sol géologique subit la loi des effets du ciel lointain, donc de Jupiter, Saturne et Mars. Le sol est présenté comme un organe dans l’organisme : il est un diaphragme, le ventre du domaine agricole. Steiner confère donc une vie magique à tout ce qui est, une vie en relation avec d’invisibles forces venues du cosmos.

Ce fameux cosmos n’agit jamais directement sur les plantes, mais toujours via la terre, son vecteur. Steiner pose que la vie du sous-sol est rythmée d’une façon particulière et qu’« entre le 15 janvier et le 15 février » (62) le sous-sol s’émancipe de sa proximité avec la terre pour passer directement sous l’influence des forces cosmiques les plus éloignées qui sont actives à l’intérieur de la terre. Il s’agit d’une « force de cristallisation ». Steiner ne s’appuie sur rien d’autre que du performatif : c’est ainsi. Le simple fait de dire fait être. Le logos est actif, donc action, le verbe dit devient un faire. Parler fait advenir. Steiner peut donc bien ajouter : « Ce sont là des choses qui auront un jour valeur de données exactes » (62) sans donner plus de précisions, il suffit là encore d’annoncer que l’hypothèse sera un jour vérité pour qu’elle cesse d’être hypothèse et devienne de facto vérité – on dirait du Freud… Ainsi, Steiner affirme que, dans le sous-sol qui est vivant, alors qu’au-dessus c’est mort, il y a « un principe de vie intérieure, quelque chose (sic) de vivant » (61). L’anthroposophe ne s’embarrasse pas de détails : le quelque chose suffira. Ce que l’on sait, c’est que le registre pour dire ce vivant n’est ni atomique, ni scientifique, ni matérialiste, qu’il ne renvoie à rien de la science du temps, et que Steiner parle d’éthérique et d’astral – il entretient par exemple de « l’éther de la vie du sol » sans avoir pris soin de détailler ce qu’il en est de la nature incorporelle, immatérielle, ineffable, indicible de ce qui, pourtant, joue un rôle majeur. Cette façon de convoquer des principes incorporels pour dire la vérité du monde corporel définit à mes yeux la logique religieuse.

Steiner renvoie donc aux astres pour expliquer l’ici et maintenant : ainsi, la couleur des fleurs s’explique par les relations entretenues avec les planètes : le rouge de la rose avec Mars, le jaune du tournesol avec Jupiter et la force cosmique du soleil, le bleu du bleuet avec Saturne, le vert avec la chlorophylle, donc le soleil. De même avec le goût des fruits, eux aussi en rapport avec les astres : « Dans une pomme, c’est effectivement Jupiter que vous mangez, dans la prune, c’est Saturne » (73). Idem avec les animaux qui, sur une ligne qui va du museau à la queue, subissent l’influence des astres – de la tête solaire à l’arrière-train lunaire. Pour quelles raisons raisonnable et raisonnante le penseur peut-il affirmer pareilles thèses ? On ne le saura pas. C’est ainsi. Magister dixit : sans craindre l’oxymore, sinon la contradiction, il s’agit d’une « science spirituelle » (107) !

Steiner propose ensuite une théorie des cornes et des bois : pourquoi, en effet, les vaches ont-elles des cornes et les cerfs des bois, et non l’inverse ? Question intéressante, en effet ! Réponse simple : la corne de la vache est le lieu par lequel transitent, en provenance de l’extérieur en direction de l’intérieur, des courants venus des astres. En revanche, le bois du cerf n’a pas pour fonction de ramener les courants astraux dans l’organisme, mais de les conduire du dedans vers le dehors « sur une certaine (sic) distance » (122). La corne est donc une substance particulièrement spirituelle puisqu’elle peut canaliser les forces de la vie astrale dans le corps de l’animal. Prenant l’exemple d’une vache, l’émule de Fichte propose une expérience existentielle singulière susceptible de passer pour une connaissance empirique : « Si vous étiez à l’intérieur de son ventre, vous sentiriez à l’odeur (sic) le courant des forces de vie s’écouler des cornes vers l’intérieur » (123) – même remarque avec les sabots qui jouent un rôle semblable. On comprend que la théorie anthroposophique (comme la pensée freudienne elle aussi venue d’Europe centrale à laquelle elle fait si souvent penser par la qualité de son épistémologie et sa prétention à transformer de façon performative tout caprice personnel en vérité scientifique universelle) puisse évoluer dans un monde où la raison n’a plus à faire la loi : l’influence magique des astres sur le vivant, le caractère éthérique et astral du sous-sol, le rôle dynamique tenu par les cornes de vache dans le processus de communication des forces venues du cosmos sur l’intime du vivant, voici les éléments d’une ontologie fantasque avec laquelle se constitue l’agriculture biodynamique.

Cette théorie biodynamique se double d’une pratique que Rudolf Steiner détaille dans une conférence le 12 juin 1924 : il s’agit de fabriquer un « fumier spirituel » (127) appelé à régénérer, féconder, nourrir le sous-sol, donc le sol, à partir de pratiques qui, pour ma part, me font plutôt sourire ou rire. Steiner y conserve l’idée chère à Samuel Hahnemann, l’inventeur de l’homéopathie, de petites dilutions sublimées par une pratique du vortex dans un rituel qui convoque la bouse et la corne de vache dans un concentré de pensée magique.

Voici la recette : trouver des cornes en choisissant des vaches du lieu, car « les forces des cornes provenant d’autres bêtes étrangères au pays peuvent entrer en conflit avec les forces attachées à la terre de ce pays » (137) ; peu importe leur âge, pourvu qu’elles ne soient pas trop jeunes, pas trop vieilles non plus ; ne craignant pas la contradiction, répondant aux questions des paysans, Steiner dit qu’on pourra les réutiliser trois ou quatre fois, mais exige des cornes « aussi fraîches que possible » (136) ; on évitera les cornes de boeuf ou de taureau, seule la vache est licite ; elles devront faire entre 30 et 40 centimètres ; si l’on veut réutiliser les cornes, on les placera dans une caisse dont les côtés seront rembourrés avec de la tourbe. Si l’on devait utiliser du fumier de cheval dans une corne de vache, il faudrait alors prendre soin de l’entourer avec des crins du cheval.

Ensuite : bourrer la corne du fumier de la vache ; l’hiver, l’enterrer dans un sol ad hoc, pas trop sablonneux, entre 50 et 75 centimètres, ainsi, écrit Steiner, « nous conservons dans celle-ci les forces que la corne de vache avait l’habitude d’exercer à l’intérieur même de la vache, à savoir réfléchir l’éthérique et l’astral » (127) ; cette hivernation permet de vivifier le contenu de la corne ; on obtient donc dans celle-ci une capacité de fertilisation extraordinairement concentrée et vitalisante – Pourquoi ? Comment ? En vertu de quels principes ? Selon quel processus chimique ? Steiner ne le dira pas, il suffit qu’il en offre la formule.

Plus tard, après que le sous-sol a effectué son travail magique, déterrer le tout, sortir le fumier dont l’anthroposophe nous apprend qu’« il ne sent plus du tout », puis il ajoute : « Il y a là des forces énormes tant astrales qu’éthériques. » Diluer ensuite le fumier dans de l’eau : le contenu d’une corne nécessite un demi-seau d’eau et cette quantité suffira pour traiter 1 200 mètres carrés – pourquoi pas 1 000 ou 1 500, on ne le saura pas plus que pour les autres assertions.

Quand le fumier se trouve dans l’eau du seau, il faut remuer en créant un puissant tourbillon qui doit toucher le fond du récipient. Puis, magie, il faut inverser soudainement la rotation pour créer un vortex. Ce travail doit s’effectuer pendant une heure. Steiner explique qu’il vaut mieux éviter la mécanisation de ce geste et préférer l’effectuer à la main, car, en brassant de façon ancestrale, le paysan transmet des informations sur lui-même au contenu de son seau. L’anthroposophe invite à mobiliser les amis ou la famille le dimanche pour transformer ce rituel en plaisir. Une fois obtenu le précieux liquide astral et éthérique, le pulvériser à dose homéopathique (je rappelle : un seau pour 1 200 mètres carrés) sur le sol ainsi régénéré. On obtient des fruits et légumes dignes d’un jardin d’Éden, bien sûr.

Rudolf Steiner propose une autre recette avec du quartz finement pilé comme une farine. On répète exactement les mêmes opérations : bourrer dans une corne ; enterrer l’été (au contraire de la bouse avec laquelle on hiverne, on estive avec le quartz) ; déterrer à la fin de l’automne ; conserver jusqu’au printemps ; retirer le contenu ; prendre cette fois-ci « la valeur d’un petit pois (sic) » – « peut-être même suffira-t-il de la valeur d’une tête d’épingle » ; verser ces milligrammes de poudre dans un seau dont le contenant n’est pas plus précisé, un seau suisse, dit Steiner ; tourner pendant une heure sans oublier l’opération d’inversion ; pulvériser sur les plantes. Magie assurée.

Les agriculteurs en biodynamie croient à un certain nombre d’effets : pour la bouse de corne pulvérisée à raison d’un seau par hectare, on sollicite le sol, le système racinaire, on édifie ainsi la structure du sol, on favorise l’activité microbienne, la formation d’humus, l’absorption racinaire, la rétention d’eau ; pour la silice de corne, avec 4 grammes par hectare, on traite la partie aérienne des plantes sur le principe d’une « pulvérisation de lumière », cette pratique est censée apporter une meilleure qualité lumineuse aux plantes et, au choix, la pulvérisation favorise la vigueur de certaines plantes ou bien en atténue la luxuriance ; la potion préviendrait également les maladies.

L’extravagance de Rudolf Steiner en matière d’agriculture ne s’arrête pas là. Il complète sa théorie du fumier le 13 juin 1924 en affirmant qu’il reprend à son compte les thèses homéopathiques de la grande puissance des petites substances. À cet effet, il parle de « fumure homéopathique » (158). Il donne six recettes pour tonifier et fortifier le fumier et lui permettre d’obtenir les meilleures grâces de certaines substances nécessaires à l’excellence de l’agriculture biodynamique – potassium, calcium, fer, acide silicique, phosphore.

Pour ce faire, sur le même principe qu’avec la bouse de corne et la silice de corne, Steiner propose des recettes à mi-chemin du rituel de sorcellerie et du canular. Première recette : cueillir des fleurs d’achillée, qui s’avère une plante excellente pour remédier aux maux provoqués par la faiblesse astrale ; sa puissance est telle qu’elle agit du simple fait de sa présence ; mettre sa récolte dans une vessie de cerf que l’on coud – la vessie de cerf est en relation directe avec le cosmos ; pendre ce résultat l’été, à l’air libre, dans un endroit aussi ensoleillé que possible ; la décrocher à l’automne ; l’enterrer l’hiver de façon assez peu profonde ; lorsqu’on la sort de terre, la mélanger à un gros tas de fumier : « Le rayonnement agit » (162), affirme Steiner, en vertu d’une « force de radiation extraordinaire ».

Deuxième recette : récolter des fleurs de camomille et les bourrer dans des boyaux de bovidés : « Au lieu de faire comme tout le monde aujourd’hui et d’utiliser les boyaux de bovidés pour faire des saucisses, faisons donc des saucisses avec de la camomille préparée comme il a été dit » (164). Placer ces saucisses dans la terre, là où la neige prend son temps pour fondre. Sortir le tout au printemps. Incorporer au fumier qui, répandu dans la terre, va la vivifier, la stimuler et permettra la production de plantes plus belles et plus saines.

Troisième recette : pratiquer comme avec l’achillée et la camomille et prélever des orties qui attirent naturellement le fer et, de ce fait, assainissent les sols. Les enfouir directement dans le sol, mais recouvertes d’une mince couche de tourbe. Laisser passer l’hiver sous terre et l’été, soit une année. Steiner écrit alors ceci : « Mélangeons maintenant cette préparation au fumier comme nous l’avons fait pour les autres selon les indications précédentes et nous donnerons à ce fumier une sensibilité (sic), j’ai bien dit (sic) une sensibilité, de sorte que le voilà maintenant comme doué de raison (sic) et qu’il ne permet pas que quelque élément que ce soit se décompose mal, laisse l’azote s’en aller », etc. Ce fumier raisonnable rendra la terre raisonnable, poursuit l’anthroposophe.

Quatrième recette : mêmes techniques avec l’écorce de chêne qu’il faut réduire en miettes. Steiner de poursuivre : « Puis nous prenons sur un de nos animaux domestiques, peu importe au fond lequel, le crâne, la boîte crânienne »  (171) pour y verser la préparation que l’on referme « si possible avec des os ». Macabre rituel où le crâne de son chien ou de son chat devient le réceptacle d’une étrange magie. Enfouir peu profondément dans la tourbe, aménager une rigole pour conduire l’eau de pluie sur l’ensemble, il s’agit d’obtenir comme une vase. Laisser passer un hiver et un automne. Ajouter au fumier qui devient ainsi une potion magique pour prévenir les maladies des plantes.

Cinquième recette : s’enquérir de pissenlits, les coudre cette fois-ci dans un mésentère de bovidé. Placer la préparation en petites boules dans la terre. Les sortir. Constater ceci : « Elles sont effectivement (sic) totalement (sic) pénétrées d’influences cosmiques » (174). Ajouter au fumier et, selon le principe homéopathique, disposer ainsi, avec quelques grammes de pissenlit enfouis dans des viscères placés sous terre, d’un produit capable de vivifier le tas de fumier qui se trouve dans la cour de la ferme. Ce fumier sublimé et répandu permet aux plantes de devenir sensibles : elles captent alors tout ce qu’il est possible de capter.

Sixième recette : Rudolf Steiner propose de confectionner l’engrais exclusivement avec ces cinq plantes, mais, sans craindre la contradiction, il en ajoute une sixième – la valériane. Diluée dans de l’eau tiède, versée sur le fumier, elle s’avère excellente pour le phosphore. Voilà comment, en partant de l’excellent constat de la pollution des sous-sols agricoles avec les produits chimiques et en souhaitant une agriculture biologique non polluante, l’anthroposophe élabore cette agriculture biodynamique qui tient de la recette de bonne femme, des rituels de sorcellerie et de la pensée magique. À l’issue de cette conférence, Rudolf Steiner répond à quelques questions des auditeurs : la vessie de cerf doit être celle d’un mâle ; l’ortie doit être dioïque ; le tas de fumier ne doit pas être trop haut, il lui faut garder le contact tellurique ; on ne doit pas le contenir dans un appareillage de pierre ; l’écorce doit être prélevée sur un chêne rouvre.

Mais personne ne remet en question le principe homéopathique, la correspondance poétique entre les fleurs et les substances minérales qu’elles sont censées incarner. Le maître ayant parlé, on ne discute pas du fond de l’exposé, on pose des questions de détail. La bouse et le cilice de corne, l’achillée dans une vessie de cerf, la camomille dans un boyau de vache, l’écorce de chêne dans le crâne de son chien domestique, le pissenlit dans un mésentère de bovidé, voilà qui constitue, déjà, une étrange série de rituels magiques ! Il faut imaginer le paysan éviscérant un cervidé, ses veaux et vaches, déterrant le cadavre de son animal domestique pour en récupérer le squelette, préparant ses recettes extravagantes, mélangeant ses produits infinitésimaux à des tas de fumier gigantesques pour prêter à ces excréments petitement allongés de fleurs et de triperie le pouvoir de capter les forces venues du plus loin des planètes dans le cosmos. On évitera de se souvenir, en buvant son vin issu de l’agriculture biodynamique, qu’il aura fallu pour l’élaborer des défécations, animales, du purin, des viscères, des fleurs cousues dans des boyaux, de l’écorce entée dans la boîte crânienne du chien que son maître caressait jadis.

Rudolf Steiner ajoute pourtant d’autres extravagances pour mettre au point son agriculture biodynamique – notamment en théorisant l’incinération. Après l’enfouissement et la décomposition, l’occultiste propose d’autres solutions pour agir sur les forces cosmiques et en obtenir les meilleurs effets : la crémation et la dispersion des cendres. On ne pourra pas s’empêcher de penser qu’avec ces nouveaux rituels l’anthroposophie postule qu’avec la mort on agit sur le vivant, qu’avec la pourriture on obtient des naissances, qu’avec des corps d’animaux brûlés on crée de la matière à fort pouvoir actif. Dans sa sixième conférence, le 14 juin 1924, il aborde la question des mauvaises herbes et les inscrit dans le dispositif cosmique – elles aussi, bien sûr, vivent de l’énergie venue des planètes et sublimée par le sous-sol.

Toujours dans la logique homéopathique qu’une tête d’épingle d’une substance peut agir sur plusieurs hectares, Rudolf Steiner propose de nouvelles recettes pour soigner, guérir par les plantes, prévenir des pathologies, empêcher le retour d’une épidémie qui ravage les cultures.

Une fois de plus, la proposition pratique issue des considérations théoriques astrologiques, ésotériques et occultistes confine aux pratiques de sorcellerie, aux rituels de magie, aux recettes de bonne femme prétendument enracinées dans le savoir millénaire des gens de la terre – rappelons que Steiner, théoricien de l’agriculture qui moque la théorie et vante les mérites du paysan, n’a jamais eu aucun contact personnel et direct avec le travail des champs : il se contentait de penser l’agriculture du fond de son fauteuil.

La doctrine anthroposophique jette un certain discrédit sur un abord trop intellectuel du monde et souhaite un contact direct avec le réel, mais, à rebours de ce qu’elle annonce, elle aggrave les torts d’une civilisation de la spéculation, de la bibliothèque, du séminaire, du cours, du colloque, du théorétique, de la scission radicale des idées et du concret. L’homme des 6 000 conférences et des 370 livres publiés a construit un monde de papier, un château de cartes conceptuelles qui renvoie les plus fameux philosophes de l’Idéalisme allemand du côté des empiriques et des matérialistes les plus grossiers !

Chez Steiner, les idées fonctionnent dans un monde sans aspérités phénoménales : les arbres, les forêts, les champs, les plantes, les herbes, les fruits, les légumes ne sont jamais que des concepts : l’Arbre, la Forêt, le Champ, la Plante, l’Herbe, le Fruit, le Légume… Et ces idoles majuscules ne sont pas ce qu’elles donnent l’impression d’être (à savoir tel arbre, telle forêt, tel champ, etc.), mais une allégorie, un symbole, une force, une métaphore en relation avec des forces invisibles, indicibles, ineffables, mais postulées et toutes-puissantes dans leur épiphanie performative.

Revenons à nos mauvaises herbes : Rudolf Steiner propose de cueillir leurs graines, de les brûler dans un feu de bois et de recueillir les cendres (il dit aussi « le poivre ») chargées de forts pouvoirs cosmiques. Il suffit de répandre cette poudre dans le champ qu’on souhaite traiter et, en deux ans, on constate (du moins il l’affirme) que les mauvaises herbes sont moins abondantes puis, deux ans plus tard, soit quatre au total, on voit clairement qu’elles ont disparu.

Si l’on veut en finir avec les pissenlits dans son pré, on agit ainsi, et au bout du cycle de quatre années, ils auront quitté le champ.

À ce moment de son exposé, Rudolf Steiner propose l’épistémologie (gardons le mot par facilité) de sa démarche : certes, il n’y a pas de preuves de ce que les choses se passent ainsi, mais pas besoin d’attendre les preuves : « Car je suis certain, sûr et certain (sic), que cela marche. Je m’explique : à mes yeux, les vérités de la science spirituelle sont vraies par elles-mêmes. Elles n’ont pas besoin d’être confirmées par d’autres contextes, à l’aide d’autres méthodes relevant de la connaissance sensible » (198). En matière de science spirituelle (on appréciera l’oxymore), on connaît les choses « parce qu’elles s’imposent intrinsèquement » (198). On ne peut mieux affirmer que l’agriculture biodynamique est un acte de foi, qu’elle refuse et récuse la méthode expérimentale, qu’elle n’a que faire des validations universellement convenues dans le domaine scientifique : hypothèse, expérimentation, validation, réitération des expérimentations, répétition des validations, conclusion de la vérité de l’hypothèse devenue loi scientifique. Rudolf Steiner en appelle à la foi, à la croyance, à l’intuition, à l’instinct, au sentiment intime. Il lui suffit de dire pour que soit fondée sa doctrine.

Le voilà donc donnant une recette pour combattre la prolifération des mulots dans les champs : en capturer un, puis – donnons la parole à Steiner : « On peut l’écorcher, dépouiller ce mulot assez jeune de sa peau » (199). Mais, chose importante, essentielle, sans laquelle la magie n’opérera pas, il faut effectuer cette vivisection « à l’époque où Vénus est dans le signe du Scorpion ». Si tel n’est pas le cas, l’opération est vouée à l’échec. Ensuite, on brûle la peau de cette petite bête sacrifiée, on récupère les cendres dans lesquelles « il reste la force négative qui s’oppose à la force de reproduction du mulot ». Pourquoi ? Pas besoin de préciser – c’est ainsi.

Répandre ensuite « le poivre ainsi obtenu » (201) à partir de la peau d’un mulot écorché. Puisque dans son univers, mental le principe de non-contradiction ne saurait faire la loi, Steiner écrit : « On peut agir à dose encore plus homéopathique. On n’a pas besoin d’une assiette à soupe remplie de poivre à ras bord. » Mais, dans le même mouvement, il affirme : « Attention, ces animaux ont du toupet (sic), ils recommencent à se montrer dès l’instant où l’épandage du poivre a laissé des trous à certains endroits. Là où il n’y a pas de poivre, le mulot refait son nid. »

Lors de la séance des questions qui suivent son exposé, un interlocuteur lui demande comment répartir la cendre sur le champ. Il ne craint pas de répondre : « On peut vraiment procéder comme quand on saupoudre quelque chose de poivré. La cendre a un rayon d’action tellement étendu qu’il suffit véritablement et proprement de passer à travers le champ et de saupoudrer » (222).

En dépit de toute saine et simple logique, Steiner peut donc dire : un : la peau d’un mulot suffit pour traiter le champ ; deux : il faut en mettre partout, car là où il n’y aura pas eu d’épandage de cendres les mulots reviendront ; trois : saupoudrer suffit, la force active du produit est telle qu’on peut se contenter d’un passage. Ce qui revient à dire que saupoudrer la peau d’un seul mulot convient pour la totalité d’un champ qui, de ce fait, aura été entièrement traité – mais, malgré tout, bien qu’il ait pu être entièrement traité du simple fait de la force de la préparation, là où elle n’aura pas été répandue, le mulot reviendra. Ainsi, pile, Steiner gagne ; face, son interlocuteur perd. À quoi il ajoute que, si le voisin n’a pas procédé lui aussi selon la méthode anthroposophique, les mulots reviendront !

Si l’on veut traiter un champ pour que des insectes ne reviennent pas, on fait de même en brûlant l’insecte et en répandant ses cendres. Si l’on veut combattre la rouille, on prépare une tisane de prêle des champs concentrée, diluée, répandue non par pulvérisation, mais par aspersion, on obtiendra un soin contre toutes les maladies cryptogamiques. Pas besoin de pulvérisateur, l’aspersion « agit sur de grandes distances malgré les très petites quantités aspergées » (212). Si l’on veut traiter contre certains animaux, il faut distinguer ceux dont la moelle est centrale et les autres dont la moelle est épinière : pour les premiers, on brûle l’animal en entier, pour les seconds, seulement leur peau. Si l’on veut traiter contre des plantes aquatiques, on procède selon la même logique, mais on asperge les berges – Steiner ne va pas jusqu’à inventer la mémoire de l’eau.

Cessons là. Boire un vin obtenu selon les méthodes de l’agriculture biodynamique s’avère donc une extraordinaire aventure dans laquelle on aura rencontré du fumier ou de la poudre de caillou dans une corne de vache, de l’achillée dans des vessies de cerf, de la camomille dans des boyaux, de l’écorce de chêne dans un crâne d’animal domestique, des pissenlits dans un péritoine, de l’aspersion de tisane de valériane, des mulots écorchés, leurs peaux brûlées, des insectes et des larves incinérées, des cendres répandues, des informations venues des planètes du cosmos transmises par le sous-sol aux plantes et aux arbres, aux fruits et aux légumes. Steiner trouvait que les hommes étaient devenus matérialistes en Europe au moment où la pomme de terre est arrivée sur leur continent. Sa science spirituelle fonctionne en effet comme un antidote à la science digne de ce nom. Il souhaitait que les acquis de sa théorie de l’agriculture biodynamique soient d’abord ésotériques, confinés aux seuls adeptes de sa doctrine. Il croyait qu’un jour viendrait où la théorie de l’agriculture anthroposophique pourrait être révélée au plus grand nombre. Il existe partout sur la planète des tenants de cette agriculture-là : elle fait juste perdre du temps à ses sectateurs.

Mais il y a également une médecine anthroposophique, une pharmacie anthroposophique, une pédagogie anthroposophique avec ses écoles concrètes. Qu’un vin soit imbuvable, rien de bien grave. Que des agriculteurs vendent sur le marché des produits ayant goûté de l’extrait d’achillée en vessie de cerf ou de l’écorce de chêne dans le crâne de son chat domestique, rien de dramatique non plus. Mais que des médicaments et des soins soient prodigués à des malades ou des enseignements à de jeunes enfants selon les principes astrologiques, occultistes, ésotériques de l’anthroposophie, voilà qui est plus grave. Le vitalisme n’a pas besoin de ce genre d’amis.

Michel ONFRAY

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Professeur de Philosophie
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Un commentaire pour Michel Onfray : critique de la Biodynamie

  1. A reblogué ceci sur Paysannerie Rebelleet a ajouté:
    Un extrait du chapit 4. d’un livre écrit par Onfray.

    En tant que paysanne rebelle, je suis consciente que les courants alternatifs en agriculture sont intoxiqués et vérolés par l’anthroposophie. Cela peut parraitre sans grande importance, voire inoffencif, mais j’ai le sentiment que c’est tout le contraire en fait. Quand on voit que des idées aussi cinglées ont survécu depuis quasi 100 ans, qu’elles jouissent actuellement d’un regain, et que les institutions ratachées à ce potentiel risque de dérive sectaire (pour faire dans la diplomatie) qui la compose forment un réseau tentaculaire qui rejoignent un public beaucoup plus large que ses propres membres officiels.

    La perversion dont fait preuve Steiner, en explicitant ses techniques pour camoufler les aspects les plus innavouables de l’anthroposophie me laisse à croire que ce qu’il a créé est tout aussi obscure et toxique.

    Le sens critique est quelque chose de trop précieux pour être mis de côté. Faites attention à ce courant qui joue « l’alternative parfaite »

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